mardi 24 janvier 2012

L'énigme de Catilina - Steven Saylor


J'ai déjà eu l'occasion de parler dans un billet précédent de la collection "Grands détectives" des Éditions 10/18. J'avais évoqué à ce propos la série Les mystères de Rome écrite par Steven Saylor et que m'avait fait découvrir un ami passionné (tout comme moi) par la Rome antique. Aujourd'hui je vais vous parler plus précisément de l'un de ses bouquins, centré sur la conjuration de Catilina, qui a eu lieu historiquement une dizaine d'année avant le coup d'état de Jules César.
Après des années comme enquêteur à Rome, Gordien s'est retiré avec sa famille à la campagne, dans la villa dont il a hérité d'un de ses amis. Loin de l'agitation perpétuelle et des intrigues politiques de la grande ville, il mène, malgré des querelles avec son voisinage, une vie d'exploitant agricole aussi paisible que possible. C'était du moins le cas, jusqu'à ce que le consul Cicéron lui demande d'héberger dans le plus grand secret, son principal adversaire politique, Lucius Sergius Catilina. A partir de ce moment d'étranges événements se succèdent sur son domaine. A commencer par l'apparition d'un cadavre sans tête...
Gordien n'en est pas à sa première enquête et l'auteur s'amuse à nous le rappeler, avec cependant peut être un peu trop de précipitation car de nombreuses autres aventures ont été écrites par la suite. Quoi qu'il en soit ce n'est plus le fringant jeune homme du début, mais un père de famille avant tout préoccupé du bien-être et de la sécurité de ses enfants et de son épouse. Ces sujets d'inquiétude intemporels crédibilisent le narrateur.
Par ailleurs, l'auteur, diplômé d'histoire et de littérature antique, arrive toujours aussi bien à nous faire pénétrer dans la vie quotidienne d'un romain de cette époque. L'utilisation des thermes privés, la place des esclaves, l'entrée dans la majorité d'un jeune citoyen romain... et même la rencontre avec certains grands personnages comme Catilina, Cicéron et Jules César. Tout cela est raconté sans qu'une ombre d'ennui ne vienne déranger la lecture ou que l'on ait l'impression d'assister à un cours d'Histoire. Seuls certains passages destinés à expliquer le contexte politique général peuvent paraitre un peu artificiels, mais ils ne parviennent décidément pas à gâcher le plaisir. D'autant plus que l'intrigue, si elle n'est pas d'un suspense à couper le souffle, arrive suffisamment à intéresser le lecteur pour lui faire tourner les pages. Et bien que les aventures de Gordien soient d'une qualité à peu près constante, celle-ci est sans doute l'une des meilleures.

Note : 4/5

vendredi 6 janvier 2012

L'annnée du mensonge - Andreï Guelassimov


S'il y a un label auquel on peut faire confiance pour la qualité de ses publications, c'est bien Babel, la collection de poche des Éditions Actes Sud (et non je n'en possède pas d'actions). Après Platonov de Tchekhov, Oedipe sur la route et Antigone d'Henry Bauchau et La nuit des princes charmants de Michel Tremblay, je me suis risqué une nouvelle fois après un choix minutieux (quand même), à un auteur inconnu avec L'année du mensonge d'Andreï Guelassimov, croisé par hasard à un Pêle-Mêle de Bruxelles. De quoi s'agit il ? Mikhaïl, jeune débauché moscovite, est renvoyé de son travail. Son patron lui propose alors, pour le triple de son salaire précédent, de faire un homme de son fils Sergueï. Oui mais voila, sa véritable mission n'est-elle pas de l'espionner ? L'adolescent, intelligent mais dépressif, constamment scotché à son ordinateur, ne cesse de le surprendre. Surtout lorsqu'il s'aperçoit que ce dernier entretient une relation avec la magnifique Marina, qui ne le laisse pas non plus indifférent. Autour de ce trio amoureux gravitent d'autres figures : Pavel, le père de Serguëi, Michka le petit frère de Marina, Sacha-Mercedes, bandit plus bête que méchant... La narration adopte successivement le point de vue de plusieurs d'entre eux, même si c'est par les yeux de Mikaïl et de Sergueï que l'on voit le plus l'histoire. Cette dernière constitue en une succession de situations embarrassantes, dont les personnage vont constamment essayer de sortir par des mensonges, qui leur créeront de nouveaux problèmes. Au delà du récit, c'est plus le ton adopté par l'auteur, souvent très drôle, qui constitue l'intérêt de ce livre. On découvre aussi la Russie de 1998, alors en pleine crise économique et de nombreuses références culturelles. La Cerisaie de Tchekhov y fait même son apparition à travers les répétitions d'une bande de comédiens. Le tout ressemble à un joyeux bordel, dont la légèreté du ton n'empêche pas au lecteur de partager les sentiments des personnages.

Extrait :
Elle virevoltait devant moi, dans son pull d'un blanc immaculé, tellement ajusté que j'avais du mal à me retenir d'étendre le bras pour toucher cette blancheur souple.
- Alors ? Tu vois quelque chose ?
Elle continuait à tourner, relevant de plus en plus haut son blouson et révélant un postérieur que moulait parfaitement son jean. J'avais sous les yeux un cul d'une telle beauté que j'en restais sans voix.
- Pourquoi tu ne dis rien ? Il y a une trace ? J'ai du mal à voir.
Il me vint soudain à l'esprit qu'elle était peut-être en train de jouer avec moi. Si c'était ça, elle jouait avec le feu.
- Micha, reviens sur terre !
- Non, dis-je enfin. Il n'y a rien.
- Parfait, fit-elle en souriant. Je suis contente, je suis arrivées à le détacher.
Quand elle s'assit à coté de moi, je sentis un parfum qu'elle n'utilisait pas d'habitude. Avec Serioja en tout cas, elle sentait différemment.
Note : 4/5